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La Cour constitutionnelle ougandaise confirme une loi anti-LGBT+


La Cour avait été saisie par des militants des droits humains, deux professeurs de droit et deux parlementaires du Mouvement de résistance nationale, le parti au pouvoir.
La Cour avait été saisie par des militants des droits humains, deux professeurs de droit et deux parlementaires du Mouvement de résistance nationale, le parti au pouvoir.

La Cour constitutionnelle ougandaise a rejeté mercredi un recours demandant l'annulation d'une loi anti-LGBT+ répressive dans ce pays d'Afrique de l'Est, une décision qui a indigné les organisations de défense des droits humains.

Baptisé "loi anti-homosexualité 2023", le texte prévoit de lourdes peines pour les personnes ayant des relations homosexuelles et faisant la "promotion" de l'homosexualité. Un délit d'"homosexualité aggravée" est passible de la peine de mort, une condamnation qui n'est toutefois plus appliquée depuis des années en Ouganda.

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L'annonce du vote de cette loi en mars 2023 avait suscité une vive inquiétude de plusieurs pays occidentaux, d'institutions internationales (ONU, Banque mondiale) et d'organisations de défense des droits humains qui avaient réclamé son abrogation. Les Etats-Unis avaient imposé des sanctions contre le pays.

Faisant part de sa "consternation", le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Türk, a a de nouveau exhorté mercredi dans un communiqué le gouvernement ougandais à "abroger dans son intégralité" le texte, qu'il avait qualifié l'an dernier de "probablement le pire au monde en son genre".

Des militants ougandais de protection des droits humains, deux professeurs de droit d'une université de la capitale Kampala et deux parlementaires du parti au pouvoir (Mouvement de résistance nationale, MNR) avaient saisi la Cour constitutionnelle pour bloquer ce texte qu'ils jugeaient illégal. Ils estimaient notamment qu'il violait des droits fondamentaux protégés par la Constitution et qu'il avait été voté sans véritable consultation de la population, comme l'exige la loi fondamentale ougandaise.

Ce recours "appelait essentiellement à l'annulation de l'intégralité de la loi anti-homosexualité de 2023", a déclaré mercredi le juge Richard Buteera: "Après avoir statué, (...) nous refusons d'annuler la loi anti-homosexualité dans son intégralité et n'accorderons pas non plus une injonction permanente contre son exécution". Les cinq juges ont toutefois supprimé plusieurs dispositions qu'ils jugeaient incompatibles avec les conventions internationales, comme le fait de sanctionner la non-dénonciation d'actes homosexuels.

"Jugement sommaire"

L'avocat Nicholas Opiyo, qui a défendu le recours, a dénoncé sur X un "jugement sommaire", qui ne s'est pas élevé "au-dessus de l'intolérance et des sentiments du public". Le député Fox Odoi-Oywelowo a regretté une décision "attendue", même si "la loi est mauvaise pour le pays". Les requérants n'avaient pas communiqué mercredi soir sur une éventuelle saisine de la Cour suprême.

"Cette décision est décevante et constitue une occasion manquée de protéger des droits humains fondamentaux", a déploré à l'AFP Oryem Nyeko, chercheur sur l'Ouganda pour Human Rights Watch. La présidente du Parlement, Anita Among, a de son côté salué auprès de l'AFP une "grande réussite pour l'Ouganda". "Cette décision prouve que toutes les branches du gouvernement, le parlement, l'exécutif et le judiciaire, ont un objectif commun: protéger l'Ouganda contre toute influence étrangère négative", s'est-elle félicité.

Le président Yoweri Museveni, qui dirige le pays d'une main de fer depuis 1986, avait promis de ne pas céder pas aux pressions occidentales et promulgué le texte en mai. Cette loi bénéficie d'un large soutien en Ouganda, pays à majorité chrétienne conservatrice, où les parlementaires estiment qu'elle constitue un rempart nécessaire contre l'immoralité présumée de l'Occident.

Sanctions

Les Etats-Unis, l'Union européenne et le secrétaire de l'ONU, Antonio Guterres, ont averti les autorités ougandaises que l’aide étrangère et les investissements dans le pays pourraient être compromis si le texte était maintenu. L'administration américaine a annoncé début décembre qu'elle n'accorderait plus de visas aux responsables ougandais qui appliqueraient ce texte et retiré l'Ouganda d'un accord commercial majeur, l'African Growth and Opportunity Act (AGOA), depuis janvier.

La Banque mondiale a de son côté annoncé en août qu'elle suspendait tout nouveau prêt au pays en raison de cette législation "fondamentalement contraire" à ses valeurs. En 2014, les donateurs internationaux avaient déjà réduit leur aide après le vote d'une loi imposant la prison à vie pour des relations homosexuelles, finalement annulée par la Cour constitutionnelle pour un vice technique lors du vote.

L'homosexualité est illégale dans de nombreux pays d'Afrique de l'Est, où les campagnes de répression et de stigmatisation sont encouragées par les conservateurs religieux musulmans et chrétiens.

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